vendredi 12 juillet 2013

Réaction personnelle à la réforme du congé parental.

Récemment, a commencé à se discuter une éventuelle réforme du congé parental. Je suis tout à fait concerné puisque nous avons eu un enfant en décembre et que ma compagne a pris un congé parental. On pourrait de fait m'asséner que je me suis comporté en machiste qui a préféré laisser la mère se débrouiller avec les couches pendant que je continuais ma carrière. J'évacue immédiatement cet argument : je suis professeur, et donc, par définition, je n'ai pas de carrière au sens strict du terme ! Cela aurait pu gêner au niveau de mon engagement syndical, mais pas au niveau professionnel.

Il est d'abord intéressant d'essayer de comprendre comment on en vient à prendre un congé parental qui, à priori, provoque une baisse considérable de nos revenus : l'indemnité se monte à environ 570 € par mois, à comparer aux 1 700 € environ que ma femme touche habituellement.

Personnellement, j'étais contre. Dans mon esprit, mais là on est dans les méandres des névroses, il me semblait important que la mère reprenne le travail assez rapidement et ne s'enferme pas dans ce rapport bébé-maman qui peut aussi avoir des côtés négatifs. Pourtant, progressivement, je m'y suis rallié pour différents facteurs : ma conjointe le souhaitait réellement, nous voulions prolonger l'allaitement au sein au-delà de deux mois et demi, et nous trouvions tous les deux qu'il était bon que notre fille puisse profiter de sa mère un peu plus et ne soit pas balancée dans les structures collectives trop tôt. Ce dernier argument pourrait d'ailleurs être aussi assimilé à des névroses parentales : assumons-le.

Il faut bien avoir une idée en tête : en France, pays de la famille, paraît-il, le congé-maternité est court. Au bout de deux mois et demi, avec possibilité de prolonger 28 jours de plus, la mère doit retourner au travail, surchargeant les crèches et les nourrices avec de tous petits bébés. Et que dire du congé-paternité (14 jours en tout)...

Évidemment, pour la CAF, les choses sont claires : une femme ou un homme en congé touche son salaire à plein (sans les primes) alors qu'un congé parental est bien moins rémunéré. Là, on touche aux questions de gros sous, et on préfère donc travailler sur le congé parental que sur les autres congés.

Maintenant, cher lecteur, aurais-je pu, si je l'avais souhaité, prendre un congé parental ? Je pourrais dire d'abord que, l'un de nos objectifs étant l'allaitement au sein, je ne pouvais faire. Cependant, il existe maintenant des trayeuses qui auraient pu me permettre de continuer à donner le lait maternel sans que la mère soit présente. Certes, ce n'est pas ce que souhaitait ma conjointe, mais cela aurait été techniquement possible.

Reste cependant la question des gros sous. Ayant un salaire d'agrégé (mon fixe tourne à 2 750 €), nous avons une réelle disparité de revenus. De plus, nous assumons un crédit immobilier puisque nous avons cédé à l'appel du capital il y a trois ans, à un taux certes bas, mais cela pèse sur notre budget. En clair, il nous était impossible de se passer de mon salaire à plein sans être obligé de vendre notre appartement...

Au-delà de mon cas personnel, c'est bien, à mon sens, la faiblesse de la rémunération qui bloque les hommes, dès qu'une inégalité de revenus est présente en défaveur des femmes, ce qui est le cas dans une majorité des couples. Donc, si l'on souhaitait vraiment que les hommes prennent des congés autant que les femmes, il faudrait :
  • que la rémunération soit suffisamment attractive pour que des hommes ayant des revenus plus haut s'arrêtent ;
  • qu'un homme puisse remplacer sa conjointe au bout d'un certain temps, de manière assez souple, ce qui permettrait d'alterner et d'éviter un décrochage trop long pour l'un des deux conjoints du monde du travail, protégeant ainsi au moins partiellement la carrière ;
  • un allongement du congé-maternité et du congé-paternité, beaucoup trop courts.
Cela coûterait cher, mais après tout, la société subventionne largement les assistantes maternelles et les crèches. Reste à voir si les dépenses d'un côté équilibreraient les gains de l'autre. De plus, je ne m'inquiète pas vraiment pour les assistantes maternelles, complètement débordées par les demandes de garde aujourd'hui.

Reste un point difficile à faire évoluer : les mentalités, surtout à propos du travail des hommes et de leurs carrières. Là, j'ai bien peur que la puissance publique ne puisse rien, malheureusement...